Le village de London
Dans un village presque entièrement construit en bois, il était tout naturel que les incendies soient fréquents, spécialement au début des années quarante; et les premières lois municipales étaient votées en vue de protéger les gens contre ce fort dangereux ennemi. Il n’y avait pas de restriction quant aux feux comme c’est le cas de nos jours; mais il y avait des règlements pour la construction des foyers et des cheminées, l’emplacement des tuyaux de poêles, la manutention des cendres, etc. De plus, un officiel appelé inspecteur des incendies était chargé de faire respecter ces règlements. Quand il était question de combattre un incendie qui venait de naître, on ne pourrait dire que les dispositions étaient très efficaces. Chaque propriétaire était tenu d’avoir au moins une outre en cuir, sur laquelle on peignait son nom, accrochée en un endroit visible et accessible. Si, lorsque l’inspecteur passait, l’outre n’était pas en vue, un dossier judiciaire était ouvert et l’infracteur était dûment averti et condamné à une amende. Dès qu’un incendie se déclarait, une trompette ou un clairon mobilisait les citoyens, tout homme muni de son outre; une chaîne était formée à partir du puits ou du réservoir le plus près jusqu’à portée de lancer de l’incendie, puis les outres pleines d’eau passaient de main en main jusqu’au dernier homme, qui les vidait sur les flammes s’il était assez près. À vrai dire, la chaîne ne gaspillait habituellement pas ses efforts à tenter d’éteindre le feu, mais à empêcher de renverser les outres.
À mesure que le village prenait de l’expansion, les dangers d’incendie allaient grandissant; une fois déclenché, l’incendie avait de plus en plus de quoi se nourrir et s’il ventait un tant soit peu, le système d’outres s’avérait presque inefficace. [...]